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Les biais peuvent affecter le jugement, la prise de décision et le comportement — même chez les professionnels dentaires bien intentionnés. (Image: Franzi draws/ Adobe Stock)

mar. 12 août 2025

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Le préjugé est un aspect intrinsèque de la cognition humaine, et les professionnels de santé — y compris ceux du secteur dentaire — n’en sont pas exempts. Comprendre la nature et l’impact des préjugés est essentiel pour les praticiens dentaires soucieux d’offrir des soins équitables et fondés sur des preuves.

Définir le biais dans le contexte dentaire

Le biais peut être défini comme une prédisposition ou un préjugé, qu’il soit conscient ou inconscient, qui influence le jugement, la prise de décision et le comportement. En milieu clinique, le biais implicite revêt une importance particulière : il désigne des attitudes ou stéréotypes qui affectent notre compréhension, nos actions et nos décisions, de manière inconsciente. Ces biais peuvent orienter nos comportements de façon contraire à nos croyances et valeurs conscientes. En revanche, le biais explicite concerne des attitudes et croyances consciemment assumées et pouvant être contrôlées délibérément.

Distinguer les effets du biais implicite de ceux de la diversité est essentiel pour comprendre leurs rôles respectifs dans la formation de la culture organisationnelle et des soins aux patients. La diversité concerne la représentation et l’inclusion d’individus issus de parcours, d’identités et de perspectives variés au sein d’une organisation. Le biais implicite, en revanche, se rapporte aux hypothèses et stéréotypes inconscients qui peuvent perdurer indépendamment de la diversité présente. La simple existence d’une main-d’œuvre diversifiée ne suffit pas à éliminer les effets du biais implicite, pas plus que la reconnaissance du biais ne garantit des progrès substantiels vers l’équité.

Expressions du biais implicite en contexte clinique dentaire

Pour lutter efficacement contre le biais implicite, les professionnels dentaires doivent en reconnaître les différentes formes ainsi que les manières dont il peut se manifester en pratique clinique. Parmi les types courants de biais implicite, on peut citer :

  • Biais de confirmation : tendance à rechercher ou interpréter les informations de manière à confirmer des croyances préexistantes. Par exemple, supposer qu’un patient déclarant consommer des drogues récréatives adopte forcément d’autres comportements à risque, sans investigation complémentaire, peut entraîner une prise en charge inadéquate.
  • Biais d’affinité : préférence accordée aux personnes partageant des similarités avec soi-même, telles que l’origine, l’apparence ou l’identité culturelle.
    Cela peut entraîner des disparités dans le temps, l’attention ou l’empathie accordés à certains patients.
  • Biais d’attribution : tendance à attribuer les actions d’une personne à des traits de caractère intrinsèques, plutôt qu’à des circonstances extérieures.
    Par exemple, interpréter un rendez-vous manqué comme un signe d’irresponsabilité, au lieu de prendre en compte d’éventuels obstacles logistiques.

Ces biais sont particulièrement susceptibles d’influencer la prise en charge des patients lorsque les informations sont incomplètes et que des suppositions viennent combler les lacunes. Des facteurs tels que la tenue vestimentaire du patient, son statut socio-économique ou sa couverture d’assurance peuvent inconsciemment influencer l’étendue des options de traitement proposées. Des recherches indiquent que même des cliniciens expérimentés peuvent s’appuyer inconsciemment sur des stéréotypes lors des premières interactions avec un patient, en particulier dans des situations marquées par l’incertitude ou la pression du temps. Cette tendance peut fortement orienter leurs premières impressions ainsi que leurs décisions cliniques ultérieures.

La base cognitive du biais

La persistance des biais implicites peut être comprise à travers le prisme de la psychologie cognitive. La théorie des deux systèmes du Dr Daniel Kahneman distingue le Système 1 (rapide, automatique, inconscient) du Système 2 (lent, réfléchi, conscient). Les biais implicites relèvent du Système 1, qui régit la majorité de l’activité cognitive, tandis que le Système 2 est responsable de la pensée analytique et réflexive. Reconnaître la prédominance du Système 1 met en lumière l’importance d’adopter des stratégies intentionnelles, pour atténuer les biais dans la prise de décision clinique.

“ Lutter contre les biais ne consiste pas à désigner des coupables, mais à encourager la responsabilité et l’engagement envers le développement professionnel. ”

Stratégies pour atténuer le biais implicite en dentisterie

Lutter contre les biais ne consiste pas à désigner des coupables, mais à encourager la responsabilité et l’engagement envers le développement professionnel. Les stratégies suivantes peuvent aider les professionnels dentaires à atténuer l’impact du biais implicite :

  • Sensibilisation : Pratiquer l’autoréflexion et utiliser des outils tels que le Test d’association implicite (TAI)pour identifier d’éventuels aspects non perçus. Participer à des programmes de formation axés sur la compétence culturelle et la prise de conscience des biais peut renforcer la compréhension de l’impact des biais inconscients sur les interactions cliniques.
  • Encourager l’empathie : Cultiver l’empathie et pratiquer l’écoute active. En posant des questions ouvertes et en cherchant à comprendre les préoccupations et priorités uniques de chaque patient, les praticiens peuvent éviter de faire des suppositions basées sur des caractéristiques superficielles.
  • Standardiser les processus : Mettre en œuvre des protocoles standardisés pour les recommandations de traitement et la communication avec les patients. Présenter toutes les options de traitement de manière cohérente — indépendamment du statut d’assurance ou de la capacité perçue à payer du patient — favorise l’équité et le respect des normes fondées sur des preuves.

Le rôle du changement systémique

Bien que les efforts individuels soient essentiels, un changement systémique au sein de la profession dentaire est tout aussi nécessaire. L’intégration de formations sur les biais implicites dans les programmes d’études en odontologie prépare les futurs praticiens à offrir des soins équitables aux patients. Le développement de la diversité au sein du personnel favorise la compétence culturelle et l’empathie en reflétant les communautés desservies. Par ailleurs, la recherche continue sur les manifestations et les conséquences des biais en dentisterie, permettra de développer des interventions ciblées pour réduire les disparités.

Conclusion

En tant que professionnels du secteur dentaire, il nous incombe de réfléchir de manière critique à nos propres pratiques. Travaillons-nous activement à ce que nos biais ne compromettent pas la qualité des soins prodigués à nos patients ? En nous engageant dans un processus continu d’auto-examen et d’amélioration systémique, nous faisons progresser une profession fondée sur les principes d’équité, d’inclusion et d’excellence dans la prise en charge des patients. Le chemin vers un changement significatif commence par chacun d’entre nous.

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